Les start-ups ne veulent pas rater le train de la réindustrialisation
14 mai 2023
À travers la French Tech, Emmanuel Macron ambitionne d’ouvrir 100 sites industriels d’ici 2025 pour réindustrialiser la nation. Toutefois, de nombreux défis freinent la réalisation de cet objectif ambitieux. Les obstacles majeurs identifiés sont le financement, l’accès au foncier et la guerre des talents.
Le financement est considéré comme le principal obstacle à la croissance des start-up industrielles. Alors que les fonds d’investissement sont généralement orientés vers les start-ups digitales en quête d’hypercroissance rapide, les projets industriels ont des cycles plus longs, nécessitant souvent plus de dix ans pour atteindre la rentabilité. Cette situation freine les investissements dans le secteur industriel, d’autant plus que la hausse des taux d’intérêt limite l’accès au capital. Clément Ray, cofondateur d’InnovaFeed, explique que de nombreux entrepreneurs industriels doivent se tourner vers des investisseurs étrangers, comme le géant agroalimentaire Cargill, pour lever les fonds nécessaires à leur développement. Pour pallier ce manque de financement, l’État a injecté 2,3 milliards d’euros dans le cadre de France 2030, destiné à soutenir les start-up industrielles. En outre, un fonds paneuropéen de 3,75 milliards d’euros a été mis en place pour stimuler l’investissement en capital-risque. L’État milite également pour renforcer le fonds Tibi 2, qui devrait diriger une partie des 6 milliards d’euros espérés vers les start-ups industrielles et deeptech.
L’accès au foncier constitue un autre obstacle important. Les procédures pour obtenir des terrains et les autorisations d’implantation peuvent prendre jusqu’à dix-huit mois, un délai que Macron souhaite réduire à neuf mois. Toutefois, les entreprises du secteur, telles que Start Industrie, soulignent qu’une start-up sur deux peine à identifier des terrains disponibles. Pour résoudre ce problème, elles proposent des mesures comme la création d’un portail dédié au foncier et l’élargissement de l’offre de sites prêts à l’emploi.
La pénurie de main-d’œuvre qualifiée est également un défi crucial. Avec le retour en grâce de l’industrie, les start-ups doivent faire face à une compétition accrue pour attirer les talents, notamment les travailleurs qualifiés du secteur industriel (cols bleus). Des entreprises comme Exotec, qui combinent industrie et technologie, peinent à recruter au niveau souhaité. Renaud Heitz, cofondateur d’Exotec, indique que le modèle hybride de leur entreprise n’est pas toujours bien compris par les candidats, rendant le recrutement difficile.
De plus, fidéliser les talents sur des projets industriels à long terme est un défi supplémentaire. Jean-Philippe Thierry de Start Industrie rappelle qu’il peut falloir jusqu’à douze ans pour qu’une innovation passe du stade de la recherche à sa commercialisation, un processus qui peut démotiver les employés sur la durée.
La concurrence internationale, en particulier celle des États-Unis, complique encore la tâche des start-ups françaises. L’Inflation Reduction Act (IRA), adoptée aux États-Unis, a mis en place un cadre réglementaire et financier très attractif pour les entreprises industrielles. Plusieurs start-ups françaises ont d’ailleurs choisi de s’implanter aux États-Unis, attirées par les subventions massives et les incitations fiscales. Cette dynamique risque de provoquer une délocalisation des activités et la perte d’emplois en France, comme l’alerte Jean-Philippe Thierry.
Malgré le soutien financier de l’État et les promesses de réformes administratives, les start-ups industrielles françaises doivent surmonter de nombreux obstacles pour atteindre les objectifs fixés par Emmanuel Macron. Le financement, l’accès au foncier et la guerre des talents sont autant de défis à relever, tandis que la concurrence internationale, notamment des États-Unis, risque de détourner les entreprises françaises de leur implantation locale.
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